11 de marzo de 2016

Boris Vian

Si los poetas no fueran tan tontos

Si los poetas no fueran tan tontos
Y no fueran tan perezosos
Harían feliz a todo el mundo
Para poder ocuparse a gusto
De sus angustias literarias

Construirían casas amarillas
Con grandes jardines delante
Con sus árboles llenos de zázaros
Sus pitoflautas y sus lagárjaros
Sus gorriongrios y sus fuerrucas
Sus plumiquitos sus pardaganes
Y sus cuervecillos muy rojos
Que dirían la buenaventura

Habría grandes surtidores
Con luces en su interior
Habría doscientos peces
Desde el croquio al remusón
De la libela a la piámula
De la anguila al raricurul
Y de la avela al paturrón

Habría todo un nuevo aire
Perfumado de olor de hojas
Se comería a cualquier hora
Se trabajaría sin prisas
Construyendo unas escaleras
De formas aún nunca vistas
Con maderas veteadas de malva
Como ella suaves al tacto

Pero los poetas son muy tontos
Escriben para comenzar
En vez de ponerse a trabajar
Y eso les causa remordimientos
Que conservan hasta la muerte
Satisfechos de haber sufrido tanto
Se les dan grandes discursos
Y son olvidados en un día
Pero si no fueran tan perezosos
No se les olvidaría ni en dos.



Boris Vian. Si les poètes étaient moins bêtes (mairie-mericourt.fr)
If I Say If. The Poems and Short Stories of Boris Vian (adelaide.edu.au)
Trad. E. Gutiérrez Miranda 2016


                    ∼

Si les poètes étaient moins bêtes

Si les poètes étaient moins bêtes
Et s'ils étaient moins paresseux
Ils rendraient tout le monde heureux
Pour pouvoir s'occuper en paix
De leurs souffrances littéraires.

Ils construiraient des maisons jaunes
Avec de grands jardins devant
Et des arbres pleins de zoizeaux
De mirliflûtes et de lizeaux
Des mésongres et des feuvertes
Des plumuches, des picassiettes
Et des petits corbeaux tout rouges
Qui diraient la bonne aventure

Il y aurait de grands jets d'eau
Avec des lumières dedans
Il y aurait deux cents poissons
Depuis le croûsque au ramusson
De la libelle au pépamule
De l'orphie au rara curule
Et de l'avoile au canisson

Il y aurait de l'air tout neuf
Parfumé de l'odeur des feuilles
On mangerait quand on voudrait
Et l'on travaillerait sans hâte
A construire des escaliers
De formes encore jamais vues
Avec des bois veinés de mauve
Lisses comme elle sous les doigts

Mais les poètes sont très bêtes
Ils écrivent pour commencer
Au lieu de s'mettre à travailler
Et ça leur donne des remords
Qu'ils conservent jusqu'à la mort
Ravis d'avoir tellement souffert
On leur donne des grands discours
Et on les oublie en un jour
Mais s'ils étaient moins paresseux
On ne les oublieraient qu'en deux.


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